vendredi 10 août 2007

Piste 04 : "Some Velvet Morning" par Lee Hazlewood (avec Nancy Sinatra)

L’inspiration, je ne la comprends vraiment pas. Souriante un matin, aimable, ne voulant sous aucun prétexte vous lâcher la main, et le lendemain, c’est à peine si elle vous disait bonjour. Je la soupçonne d'être maniaco-dépressive sur les bords... Le truc, c’est qu’elle peut se permettre de faire ce que bon lui semble, à la fin, elle finira toujours par se faire pardonner. Et ça, c’est chiant. Mais bon, on ne se plaint pas vraiment… Il faut dire que quand elle revient vous voir, elle ne fait pas dans le détail : aussitôt arrivée, elle embrase votre esprit tout entier, en vous faisant vous sentir bien plus génial que vous ne l’êtes réellement et en vous poussant à composer quelque chose que, tout seul, vous auriez été bien incapable ne serait-ce que d’esquisser. Elle vous foudroie littéralement.

Je viens de finir la lecture de Harry Potter and the Deathly Hallows. J’ai du mal à l’avouer, mais je l’ai dévoré. Oui, le style est plat, oui, la quasi-totalité des personnages sont caricaturaux au point d’être pris de nausée en plein milieu d’une phrase, et oui, il n’y a pas de mot assez condescendant pour qualifier la fin du livre : il y a des tas de raisons pour détester, très peu pour aimer. Le fait est que certains passages du texte parviennent à être sincèrement émouvants et, ô divine surprise! , à doter les personnages d’une vraie psychologie, et pas une tirée tout droit des abymes de la mièvrerie made in Paul et Virginie dans lesquelles l'auteure me semblait tirer toute son inspiration. Ces moments sont affreusement rares évidemment, mais convainquent les plus sceptiques (je m’inclus dans cette catégorie) que JK Rowling n’adopte pas toujours une écriture lourde et fade, mais peut parfois être joliment inspirée.


Lee Hazlewood est mort il y a quelques jours. Et tout le monde semble s’en foutre. Il y a bien entendu les sites musicaux et aussi quelques brèves ici et là sur les sites d’information généralistes, mais sinon rien, nada. C’est regrettable. Enfin je dis ça, mais j’ai appris ça avec un jour de retard, donc bon, je ne suis pas tout à fait dans la meilleure position du monde pour faire la leçon à quiconque. N’empêche que ça reste regrettable, parce que Lee était un compositeur extra, et qu’il avait également pour lui une voix du tonnerre. D’ailleurs, il y a une chanson de lui que j’écoutais beaucoup depuis une semaine ou deux, "Some Velvet Morning", un duo renversant de classe et de virtuosité qu’il chante avec Nancy Sinatra : opposant deux thèmes musicaux, celui de Lee, viril et vaguement menaçant, à celui de Nancy, naïf et ingénu, la chanson bascule de l’un à l’autre en parfait funambule. C’est assez déconcertant au début, mais on en tombe assez vite amoureux : c’est une de ces chansons qui ont véritablement du charme (mot avec lequel les gens sont beaucoup trop libéraux). Vrai de vrai.
Le plus dingue dans tout ça, c’est que Lee Hazlewood en a composé beaucoup d’autres qui sont de la même trempe : pas de manière aussi aboutie, mais transpirant toutes le talent. Lee, son boulot, c'était de se lever le matin et de façonner ces chansons. Voilà de quoi était fait le quotidien de Lee. Voilà de quoi était fait le quotidien de quelqu'un qui l'avait à ses côtés de façon récurrente.

L’inspiration, je ne la comprends vraiment pas.